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Judaïsmes et Questions de Société
29 janvier 2012

Une association rabbinique en Israël pour la démocratie et l’avancée des droits des femmes

 « Nous croyons que la véritable voix de la Torah d'Israël soutient la démocratie, encourage la représentation féminine chez les dirigeants, témoigne du respect envers les non-juifs et est ouverte vers le monde »[1].

C'est l’une des premières déclarations d’une nouvelle association rabbinique orthodoxe moderne et sioniste, "Beth Hillel" (littéralement Maison d'Hillel), qui entend lutter contre le radicalisme du monde orthodoxe et accepte des femmes comme membres.

Le nom de Hillel fait référence à un sage talmudique du 1er siècle connu pour sa bonté et son sens de la conciliation.

L'un des leaders du mouvement orthodoxe et sioniste, le rabbin israélien francophone Shlomo Aviner, salue l'initiative en souhaitant que cet organisme "prenne des arrêts rabbiniques justifiés" mais conteste vigoureusement que des femmes soient autorisées à siéger à la direction de cette association... Il déclare " L'influence des femmes sur la direction ne doit pas s'exercer de façon ostentatoire mais discrètement, en coulisses"[2]  (sic). Il s'élève également contre la mixité au sein de cet organisme ou d'autres. Il s'appuie, pour refuser le rôle des femmes dans la vie publique, sur un avis rabbinique d'Avraham Isaac Kook (1864-1935) qui s'opposa à l'éligibilité comme au vote des femmes du temps du « yishouv » (communauté juive vivant sur la terre d’Israël avant la création de l’Etat d’Israël). Une vive divergence opposa en 1920 le rav Kook, futur premier grand rabbin ashkénaze de la communauté juive avant la création de l'Etat d'Israël et Ben Tsion Ouziel (1880-1953), futur grand rabbin sépharade de l'Etat d'Israël. A la différence du premier, le second affirma que dans le contexte de l'évolution de la condition des femmes et dans un régime démocratique, il n'y avait aucun fondement réel dans la loi juive à l'interdiction du suffrage féminin ainsi qu'à leur éligibilité[3]. Les instances sionistes en terre d'Israël s'étaient depuis lors rangées à l'avis rabbinique du rabbin Ouziel.

Cependant, la représentativité ou l'éligibilité des femmes au sein d'institutions qui touchent au religieux ont toujours été l'objet de réactions ultra conservatrices et de luttes de femmes et d'hommes pour l'équité. En témoigne le combat qu'a mené dans les années 80, Léah Shakdiel pour être la première femme éligible à un conseil municipal religieux ("mo'atsèt hadadit") dans sa localité à Yeroham dans le désert. Elle fut soutenue par la population et le maire séfardes mais se heurtât à la résistance d'une partie du corps rabbinique qui ne voulait pas s'asseoir à côté d'une femme et n'acceptait pas que celle-ci prenne part aux délibérations du conseil municipal religieux. Ces conseils se prononcent sur la gestions des affaires religieuses ou culturelles (questions de "cacherout" - abattage rituel, "mikvé"- bain rituel, éducation) d'une cité ainsi que sur  la  nomination des rabbins municipaux.

Leah Shakdiel_3 (Léah Shakdiel, première femme élue à un conseil municipal religieux. Photo prise sur le site Justevision)

 Léah Shakdiel obtint gain de cause auprès de la Cour Suprème d'Israël, son cas est référentiel dans la jurisprudence du pays et depuis des femmes peuvent siéger au sein des conseils municipaux religieux[4]

D'autres combats se poursuivent actuellement, notamment pour que des femmes, conformément à un autre arrêt récent de la Cour Suprème, siègent au sein du comité central qui nomme les juges religieux ("dayanim") en Israël. 

Sonia Sarah Lipsyc



[1] Voir l’excellent site sur le judaisme moderne orthodoxe : http://modernorthodox.over-blog.com/

[3] Voir Sonia Sarah Lipsyc, « Le leadership des femmes au sein du monde juif politique et communautaire juif. »ARCHE, Février-Mars 09 n°609-610 p 28-29.

[4] Cf. Léah Shakdiel, « Mon combat pour être la première femme au sein d’un conseil municipal religieux », traduit par Hélène Palma dans Quand les femmes lisent la Bible, sous la direction de Janine Elkouby et Sonia Sarah Lipsyc, Pardès 43, Ed. In Press, Paris, 2007 pages 227 à 233

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